Carpe Diem !  

Procédure judiciaire suite au décès de Mélanie CAILLIAU
le 29 mai 2004 en Belgique
à l'âge de 22 ans.

( 19 ans, 0 mois et 3 jours )
 

La confiance en son médecin généraliste lui a été fatale !

 
 
Justice
Plainte au pénal | Ordonnance de la Chambre du Conseil | Arrêt de la Chambre des mises en accusation
Jugement du Tribunal correctionnel | Conclusions POUR Bernard Dupont | Arrêt de la Cour d'appel
Arrêt de la Cour de Cassation | Décision de la CEDH
Exemples à l'étranger | Exemples en Belgique

Le cas judiciaire en résumé

Mélanie est décédée le 29 mai 2004 des suites d'une décompensation cardiaque dont l'origine était une varicelle contractée quelques semaines plutôt. Malgré plusieurs contacts téléphoniques, 2 consultations, la dernière ayant eu lieu quelques heures à peine avant son décès, le médecin généraliste de Kraainem a constamment sous estimé l'état de santé de Mélanie, ignorant l'historique et les signes avant-coureurs des problèmes cardiaques sévères. Il a toujours été rassurant quant au pronostic.

Notamment lors de la dernière consultation, alors que les symptômes étaient : vomissement, douleurs dans le dos et le ventre, essoufflement, rétention d'eau, fatigue intense, faiblesse générale, perte de connaissance dans le cabinet avec une tension artérielle de 6.5, il dira : « Dans deux jours tu pourras t'oxygéner dans le parc » ou encore « tu es comme une Justine Hénin sur un court de tennis qui se dit qu'elle ne peut pas jouer » ou encore « mon fils en 7ème année de médecine avaient les mêmes symptômes » ou encore « quand cela ne va plus, certains partent pour quelques jours en Egypte » !

Mélanie décèdera dans la douleur quelques heures après avoir entendu ces paroles réconfortantes !
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La Plainte au pénal

Une procédure judiciaire a été ouverte par un dépôt de plainte le 16 novembre 2004. Il concernait à l'origine deux médecins généralistes, un 'assistant' et un 'titulaire' d'un cabinet de médecine générale de Kraainem, faubourg de Bruxelles, Belgique.
L'instruction ouverte à l'encontre des deux médecins a finalement abouti à la relaxe de l'assistant et le 14 novembre 2005 à l'inculpation pour homicide involontaire du titulaire, médecin généraliste de Kraainem.
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La Chambre du Conseil - Tribunal de première instance de Bruxelles

A l'issu de cette instruction, l'affaire a été portée le 10 avril 2006 devant la Chambre du Conseil du tribunal de première instance de Bruxelles. Aucun des médecins ne s'y présentera. A la demande des conseils du médecin généraliste de Kraainem, inculpé, l'audience est remise au 15 juin 2006. Le médecin généraliste n'est toujours pas présent mais charge ses avocats de demander la suspension du prononcé - à titre subsidiaire  ! En clair, par personne interposée, l'inculpé - s'il ne peut faire autrement - admet les charges qui pèsent contre lui mais demande à ne pas être puni et bénéficier de la non-publicité des débats.
A la demande du juge, l'audience est remise au 19 juin 2006 et l'inculpé est prié de se présenter lui-même pour s'expliquer.

Le 19 juin 2006, l'inculpé fait acte de présence. Les parents de Mélanie, autorisés à prendre la parole, décrivent l'attitude révoltante que ce médecin aura eu suite au décès de Mélanie ; révoltante surtout par l'absence de tout geste d'humanisme : pas de visite des parents, pas de condoléances, pas de lettre, pas de carte, pas d'appel téléphonique, ... pas d'excuses...

Il se sera néanmoins précipité le matin même du décès aux Urgences de la Clinique Saint-Luc de Bruxelles, à deux pas du domicile des parents, pour y rencontrer le médecin urgentiste qui a vu Mélanie à sa mort.
Au tribunal, le généraliste dira simplement qu'il était paralysé et ne pouvait contacter la famille de Mélanie.

Le 18 août 2006, le verdict tombe : suspension du prononcé avec période probatoire de trois ans. En clair, pas de punition, on efface tout après trois ans, et surtout pas de publicité « pour ne pas détourner les patients de l'inculpé vers d'autres médecins » !
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La Chambre des Mises en Accusation - Cour d'Appel de Bruxelles

Suite à des protestations transmises au Ministère de la Justice, suivent immédiatement deux appels interjetés par le Ministère public et par la partie civile. Le Ministère public demande simplement la prolongation de trois à cinq ans de la période probatoire ! L'appel de la partie civile sera rejeté ; motivé par le fait que celle dernière a été satisfaite puisqu'elle a obtenu l'euro symbolique qu'elle demandait !

L'affaire a donc été fixée au 28 novembre 2006. Fidèles aux traditions de faire traîner en longueur les affaires, les conseils de l'inculpé demandent la remise de l'audience au 16 janvier 2006. Cette dernière s'est déroulée à huis clos malgré la demande de publicité des débats formulée par les parents de Mélanie et la présence de public demandant accès au tribunal.

Deux jours plus tard, le 18 janvier 2007, le verdict tombe. L'inculpé est renvoyé devant un tribunal correctionnel, la cour estimant « que la publicité des débats ne pourrait provoquer le déclassement de l'inculpé ou compromettre son reclassement ».

L'affaire est fixée au 13 juin 2007 à 14h00 devant la 54ème chambre au Palais de Justice de Bruxelles. Les débats y seront publics.
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Le Tribunal Correctionnel

La première audience publique du Tribunal Correctionnel de Bruxelles a eu lieu le 13 juin 2007. Sans surprise, le jeu des avocats de Bernard Dupont, médecin généraliste de Kraainem, inculpé d'homicide involontaire, a consisté à demander le report de l'audience.
Les motifs invoqués ont été ceux d'arguer du fait d'une réception tardive de nos conclusions (13 jours avant l'audience, alors qu'ils avaient plusieurs années - sans apport d'éléments nouveaux - pour se préparer !).
Ils mettent également en cause l'expertise médicale ordonnée par le juge d'instruction. Rappelons, que cette expertise avait été acceptée lors des passages en Chambre du Conseil et en Chambre des mises en accusation ! C'est un nouveau tournant dans la méthode de défense du généraliste, venu cette fois en compagnie de son épouse... Une première !

Jusque là, conforté par l'impunité quasi systématique accordée aux médecins en Belgique, au point même de ne pas se présenter à la première audience de la Chambre du Conseil, il n'a pas demandé de contre-expertise, il a accepté les charges qui pèsent contre lui, persuadé de l'obtention de la suspension du prononcé et de l'absence de publicité, avec de surcroît la conviction que l'argent pouvait réduire la partie civile au silence.

Sur proposition du procureur, l'audience a été remise au 18 décembre 2007 à 08h45 et au 19 décembre 2007 à 14h00 devant la 54ème chambre du tribunal correctionnel de Bruxelles.

Oui, vous avez bien lu : un report de 6 mois - seule proposition avancée par le Ministère public - malgré la suggestion du tribunal d'un report en septembre. C'est vrai que Mélanie est morte et qu'il n'y a donc plus péril en la demeure !

L’audience du 18 décembre 2007, en présence d’un public d’une soixantaine de personnes, a été consacrée à l’audition de l’inculpé et des trois médecins en qualité de ‘conseillers techniques’.
Deux de ces médecins avaient été présentés par la défense de l’inculpé et étaient, comme le citait la presse, « clairement ralliés à la cause du toubib » (Voir la page Conflit d’intérêts-Corporatisme)

L’audience du lendemain 19 décembre 2007, devant un public toujours aussi nombreux, a été consacrée à l’audition de l’expert judiciaire et du médecin légiste de l’UCL. Les déclarations ont été accablantes pour l’inculpé. Toute une série de fautes répétées lors des contacts des 5, 10, 12 et 27 mai 2004, une consultation du 28 mai 2004 ‘bâclée’ (particulièrement par l’absence d’auscultation par stéthoscope des poumons qui aurait permis de mettre en évidence l’œdème pulmonaire par les râles crépitants et sous-crépitants), une dissimulation volontaire du diagnostic, sont des faits mis en évidence lors de cette audience.

C’est dans une salle d’audience comble que les plaidoiries ont eu lieu le mercredi 30 janvier 2008 à 14h00. Le Parquet, dans sa réquisition très pertinente, a maintenu les chefs d’inculpation et a demandé une peine d’un an d’emprisonnement. Il s’est dit non opposé au sursis mais rejette la demande de suspension du prononcé de la part de l’inculpé.

Rappelons que nous demandons depuis le début de la procédure, l'application de l'article 419 du code pénal belge dans un procès 'à armes égales' conforme aux dispositions de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (Art. 6/1 qui garantit à tout un chacun un procès juste, équitable et public) ainsi qu'à l'accord cadre du Conseil (Journal Officiel des Communautés Européennes en date du 15 mars 2001) qui jette les bases d'un réel statut des victimes dans les procédures pénales.

Il va sans dire que l’inculpé se considère toujours innocent, voire victime dans ce procès. Les 8 certificats de confrères (établis en toute bonne confraternité) lui ont confirmé, dit-il, qu’il n’a pas commis de faute ! Bien entendu, il n’a exprimé aucun regret, aucun remord, ….

Le jugement a été rendu le 2 avril 2008. Bernard Dupont, médecin généraliste de Kraainem, a été reconnu coupable d'homicide involontaire ayant entraîné la mort de Mélanie et condamné à un an de prison avec sursis.

Il a fait appel !

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La Cour d'appel de Bruxelles

Bernard DUPONT a fait appel au jugement rendu par le Tribunal correctionnel le condamnant à 1 an de prison avec sursis pour homicide involontaire.

L'audience à la Cour d'appel de Bruxelles a été initialement fixée au 9 février 2009. A la demande des avocats de Bernard DUPONT, mettant en avant un problème de calendrier et le fait qu'il leur fallait plus de temps pour mettre ce dossier 'en ordre' après l'apport d'un élément nouveau à charge de leur client, la Cour d'appel leur donne satisfaction en reportant l'audience publique au 22 avril 2009 devant la 14ème Chambre.

Bernard DUPONT n'a pas jugé utile d'être présent au tribunal ce 9 février 2009. Nous y étions, accompagnés d'une quarantaine de personnes ainsi que de représentants de la presse.

L'élément nouveau a été communiqué aux conseils du prévenu à la mi-décembre 2008 par copie d'une information envoyée au Procureur du Roi auprès la Cour d'appel de Bruxelles. Il s'agit du témoignage spontané d'une famille qui incrimine Bernard DUPONT dans la mort de leur fille en 1997, alors âgée de 24 ans. Les reproches sont, comme pour Mélanie, fondées sur des négligences graves sur le plan médical, une attitude désinvolte, absence d'empathie, absence d'humanisme, absence de regrets. Même si l'affaire semble être prescrite en termes de poursuites pénales, les faits sont là et témoignent de la même attitude désastreuse de ce médecin à 7 ans d'intervalle entre les deux décès.

Le 22 avril 2009, l'audience permettra d'entendre à nouveau Bernard DUPONT qui sera interrogé sur l'utilisation d'un stéthoscope lors de l'auscultation de Mélanie le 28 mai 2004 quelques 8 heures avant sont décès. Il éludera la question sans jamais utiliser le mot 'stéthoscope'. Un stéthoscope lui aurait permis, selon deux experts, d'entendre les râles de stase de poumons qui avaient quasiment doublés de volume, étaient remplis de sang et de mousse selon le rapport de l'autopsie pratiquée quelques heures après son décès.

Le plus surprenant a été l'intervention du Ministère public. L'avocat général a en effet émis des doutes quant aux liens de causalité entre les errements de Bernard DUPONT et le décès de Mélanie. Il indiquera que si le tribunal reconnaissait l'éventuelle culpabilité du prévenu, il demanderait le bénéfice de la suspension du prononcé pour le prévenu !

Innaceptable ! Rappelons une fois de plus que suspension du prononcé = pas de peine et pas de publicité !

En termes de réquisition, la suspension du prononcé a été réclamée ou acceptée en Chambre du Conseil, en Chambre des mises en accusation et enfin en Appel. En première instance devant le tribunal correctionnel, c'est une peine de prison d'un an qui avait été demandée.

Etonnant, le Ministère public aurait-il des politiques différentes selon la juridiction ? Selon ses représentants ? Selon des courants de pensées ? Selon les changements dans les Ministères ? Ou est-ce simplement la continuation d'une politique d'impunité des médecins qui s'inscrit dans la durée ? Mystère ...

L'affaire a été mise en continuation au 4 mai 2009. A la suggestion de la Cour, il y sera question d'une éventuelle scission/requalification en homicide involontaire et/ou assistance à personne en danger. La défense maintient sans surprise que son client est parfaitement innocent ... nous plaidons, l'homicide involontaire et à titre subsidiaire uniquement, la non-assistance à personne en danger.

La Cour d'appel de Bruxelles a rendu son arrêt le 16 juin 2009 et a accordé la faveur d'une suspension du prononcé estimant que la médiatisation par la presse et par Internet constitue une peine suffisante.

Voici donc la valeur d'une vie !

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La Cour de Cassation

La Cour de Cassation a rendu son arrêt dans l'affaire concernant le Dr Bernard DUPONT, reconnu coupable d'homicide involontaire sur la personne de Mélanie CAILLIAU.

La Cour a cassé partiellement, sur un aspect 'civil', l'arrêt du 16 juin 2009 de la Cour d'appel de Bruxelles.

Par contre et sans trop grande surprise, la Cour n'a pas jugé utile de donner suite à la demande d'avis formulée par la partie civile quant à la suspension du prononcé et à sa justification par la Cour d'appel de Bruxelles arguant du fait que la médiatisation de l'affaire par la Presse et sur Internet constituait une peine suffisante. Cette avis devait faire suite à l'audition du Procureur général.

Pour seule réponse, elle se bornera à préciser que la partie civile n'a pas qualité pour se pourvoir contre les décisions rendues sur l'action publique !

Le contexte particulier et les attentes

De toute évidence, la procédure semble être parfaitement rodée et coutumière lorsqu'un médecin est inculpé pour faute. Un rapport parlementaire concernant les aléas thérapeutiques, datant de 2004 et portant sur une période de plus de 10 ans, démontre que seuls 5% des médecins inculpés d'homicide involontaire (ce qui n'est plus un aléa thérapeuthique !) sont effectivement punis. Les 95% autres bénéficient d'une suspension du prononcé - (voire classement, etc) - c'est-à-dire d'une mesure de faveur évitant toute peine et toute publicité. Il s'agit en effet d'une impunité pour le médecin moyennant une ouverture à indemnisation des victimes. D'aucuns parleront d'acheter le silence !

Or dans le cas présent, il s'agit d'un peu plus que d'une vilaine cicatrice pouvant justifier une mesure de clémence ; il s'agit de la vie d'une jeune fille de 22 ans ! Une vie n'a pas de prix ! l'argent ne peut compenser ou indemniser. Attenter à la vie d'autrui ne peut pas rester impuni.

Ce que demandent les parents, c'est toute la Justice, rien que la Justice. Une Justice rendue conformément à la Convention Européenne des Droits de l'Homme qui garantit un procès juste, équitable et public ; une Justice où les victimes ont des droits légitimes tels que stipulés dans la Décision-Cadre du Conseil du 15 mars 2001, parue au Journal officiel des Communautés européennes, abordant le statut des victimes dans le cadre de procédures pénales.

C'est donc à Strasbourg, devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme que se concluera cette affaire.
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La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH)

4 ans et 8 mois, c'est le temps mis par la CEDH pour rendre sa décision quant à la requête déposée en mai 2012.

Requête rejetée, les conditions des articles 34 et 35 n'étant pas réunies selon la Cour.

Aucun recours, aucune explication, circulez, il n'y a rien à voir !

A noter que cette même Cour pointe du doigt les États dont les tribunaux ne motivent pas (suffisamment) les jugements rendus.

Faites ce que je vous dis, pas ce que je fais ?

No comments .........

Le Code Pénal belge

Pour mémoire :

Art. 418. Est coupable d'homicide ou de lésion involontaires, celui qui a causé le mal par défaut de prévoyance ou de précaution, mais sans intention d'attenter à la personne d'autrui.

Art. 419. Quiconque aura involontairement causé la mort d'une personne sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et d'une amende de cinquante francs à mille francs.

Art. 422bis. Sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de cinquante à cinq cents francs ou d'une de ces peines seulement, celui qui s'abstient de venir en aide ou de procurer une aide à une personne exposée à un péril grave, soit qu'il ait constaté par lui-même la situation de cette personne, soit que cette situation lui soit décrite par ceux qui sollicitent son intervention.

Le délit requiert que l'abstenant pouvait intervenir sans danger sérieux pour lui-même ou pour autrui. Lorsqu'il n'a pas constaté personnellement le péril auquel se trouvait exposée la personne à assister, l'abstenant ne pourra être puni lorsque les circonstances dans lesquelles il a été invité à intervenir pouvaient lui faire croire au manque de sérieux de l'appel ou à l'existence de risques.

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